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23/03/2015

L'Art d'écouter les battements de coeur, Jan-Philipp Sendker

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Le père de Julia, Tin Win, a disparu depuis quatre ans. Un jour, il a pris un avion pour une prétendue réunion à Boston et il n'est jamais revenu. Partagée entre la colère, l'incompréhension et la tristesse, Julia découvre un carton contenant les documents de son père et une lettre d'amour adressée à une mystérieuse Mi Mi vivant en Birmanie. Elle décide alors de partir à la recherche de son père en Birmanie, son pays natal. Sur place, elle va rencontrer un homme énigmatique, U Ba, qui semble en savoir bien plus sur son père qu'elle même. Le voyage de Julia va la conduire à la découverte de la Birmanie, de sa culture et de ses croyances mais surtout à la découverte du passé de son père dont elle ne sait rien. U Ba lui raconte alors l'histoire d'un enfant maudit par les étoiles, abandonné par ses parents, capable d'entendre les battements des coeurs et follement amoureux d'une jeune fille de son village. Petit à petit, Julia va retrouver les traits de son père dans ceux de cet enfant.

L'Art d'écouter les battements de coeur est un conte moderne. Les prémonitions et les étoiles guident les Birmans et cette culture laisse une large place au surnaturel et à l'extraordinaire. J'ai aimé la narration enchâssée : U Ba raconte à Julia le passé de son père qu'elle nous rapporte à son tour. J'ai aimé l'aspect merveilleux de certains extraits et l’immersion dans la culture birmane qui nous offre un regard différent sur la vie, l'amour et la mort. Cependant, je crois que l'aspect merveilleux du conte m'a empêchée de m'attacher véritablement aux personnages. La fin du roman est vraiment très surprenante.

J'avais lu d'excellentes critiques avant de participer à la masse critique de Babelio. J'ai été déçue de ne pas plus aimé le roman et de ne pas plus être touchée par la quête de Julia et par l'histoire de son père. Pour sa défense, j'ai lu L'Art d'écouter les battements de coeur juste après mon grand coup de coeur pour La Promesse. C'est toujours bien difficile pour un roman qui suit un coup de coeur...

Pour conclure, L'Art d'écouter les battements de coeur est un conte moderne empreint d'orientalisme agréable à lire mais pas inoubliable.

Je remercie vivement Babelio et la maison d'édition Le Livre de Poche !

 

Fanny

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09/03/2015

La Promesse, Jean-Guy Soumy

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Résumé de l'éditeur: « Une femme deviendrait un homme. Une morte, un vivant. Cela ne se peut... »Et pourtant... Camille, jeune armateur bordelais qui a toujours vécu sous l'emprise de sa mère, se retrouve contraint par la justice d'incarner dans son procès « le corps et la voix » de sa cousine Jeanne, accusée d'« homicide contre elle-même ». Nous sommes à la veille de la Révolution et le royaume intente des procès aux suicidés, coupables du pire des crimes contre Dieu et contre le roi : s'ôter la vie. Si le fait est reconnu, la sentence est terrible : la mémoire de la condamnée doit être « éteinte et supprimée à perpétuité », son cadavre traîné dans les rues, face contre terre, puis pendu, et enfin jeté avec les immondices et cadavres d'animaux, comme « indigne d'une sépulture chrétienne ». 

Comment Camille pourrait-il accepter que Jeanne, sa Jeanne, soit traitée ainsi ? Des années plus tôt, à l'âge du premier grand amour, il a laissé sa famille le séparer de Jeanne. Toutes ces années, comme ils se l'étaient promis, elle l'a attendu. Il n'est pas venu. Il en a épousé une autre. Jeanne a fini par se tuer, de chagrin. Comme si elle avait compris que seul cet acte, le plus tabou qui fût dans la société de l'époque, pouvait les réunir, par-delà la vie et la mort. Et révéler, enfin, Camille à lui-même, en l'obligeant à honorer la promesse de leurs quinze ans.

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Dès le début du roman, Isabelle de Gralis, aristocrate et négociante bordelaise, annonce à son fils, Camille, que sa cousine s'est suicidée. Cette cousine c'est Jeanne, son amour de jeunesse qu'il n'a pas vue depuis une dizaine d'années et avec laquelle il avait vécu de magnifiques instants à la campagne dont il a pris soin de refouler les souvenirs depuis qu'il est adulte. Au XVIIIe siècle, le suicide est reconnu par l'Eglise Catholique et par la Justice comme un homidice contre soi-même et du même fait contre le Roi et contre Dieu. Le cadavre du suicidé est enfermé en prison en attendant son procés. Le "criminel" doit alors être représenté par un membre de sa famille lors de son procès et doit essayer de se défendre par delà la mort et grâce à la voix du vivant.

Camille va devoir venir le corps et l'âme de Jeanne lors de ce procès. La peine encourue est double: le corps de la suicidée sera traînée face contre terre dans la ville, pendue sur la place publique et enterrée hors de la terre sacrée et sa mémoire sera effacée, son nom n'apparaîtra plus sur aucun registre et ce sera comme si elle n'a jamais existé. Le XVIIIe siècle et ce sujet sont très intéressants à découvrir. Camille est prêt à se battre pour défendre le corps et la mémoire de sa cousine quitte à fâcher sa mère et à choquer le tribunal.

Ce procès va forcer Camille à enquêter sur les circonstances de la mort de sa cousine mais il va surtout lui permettre de faire un voyage dans le temps. Il va devoir revivre son passé, comprendre sa relation amoureuse adolescente avec sa cousine et surtout comprendre pourquoi il n'a pas respecté la promesse faite à sa cousine.

J'ai adoré ce roman qui est un véritable coup de coeur pour moi ! La Promesse est une très belle surprise ! Je trouve que la narration est très intéressante: le récit nous est raconté par un narrateur externe qui nous permet d'appréhender l'histoire de manière objective puis le héros nous rapporte les événements en dévoilant ses sentiments, ses troubles et ses souffrances. Un dialogue s'instaure entre Jeanne et Camille par delà la mort puisque certains chapitres nous donnent à entendre la voix de Jeanne.

La psychologie des personnages, leurs sentiments ou leurs motivations nous donnent l'impression de bien les comprendre. Camille, son frère Bertrand et Jeanne sont attachants. L'écriture de Jean-Guy Soumy est très poétique. Ce roman est délicieux à lire et le sujet abordé est inhabituel et passionnant !

 

"Allons ! Je t'en prie, Camille ne sois pas triste. Le suis-je, moi? Nous sommes de nouveau réunis. Certes, il a fallu que les événements se précipitent... Me précipitent. Au fond, c'est bien ainsi. Je ne regrette rien. Il n'y avait pas d'autre issue.

Tout au contraire, réjouis-toi! Nous allons de nouveau passer de longues heures ensemble. Éprouver la douce fusion que nous avons jadis connue. Nous allons réaliser ce vœu qui nous tenait à cœur. Notre promesse, t'en souviens-tu? Ne t'inquiète pas, je ne souffre plus.

Mais, Camille, tu ne m'entends toujours pas? "  

 

Fanny

Je remercie très vivement la maison d'édition Robert Laffont et Babelio qui m'ont offert ce roman dans le cadre de la masse critique. Merci de m'avoir fait découvrir ce roman et cet auteur !

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05/03/2015

Baronne Blixen, Dominique de Saint Pern

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Quelle a été ma joie lorsque j'ai découvert la publication de Baronne Blixen ! J'ai lu La Ferme Africaine à 18 ans, dans une petite chambre d'étudiant, tard le soir. Au lieu de réviser les ennuyeuses kholles du lendemain, j'ai voyagé sur un autre continent et dans un autre siècle. Karen Blixen m'a permis de voyager à un moment de ma vie où j'en avais terriblement besoin et elle a ouvert pour moi une fenêtre sur le monde et sur l'Afrique. Ce roman compte pour moi et je lui dois beaucoup.

Baronne Blixen est un roman autobiographique sur la plus célèbre des auteurs danoises. Dominique de Saint Pern nous entraîne sur les pas de Karen Blixen pendant quelques années seulement.

La première partie du roman débute par le tournage de Out of Africa et relate la rencontre de Meryl Streep et Clara, ancienne secrétaire de Karen Blixen et sa testamentaire littéraire. Ensemble, elles visitent des lieux chers à Karen Blixen, retrouvent Tumbo l'enfant noir aimé par Karen devenu grand-père et Clara permet à Meryl Streep de comprendre l'auteur et de rentrer petit à petit dans son rôle. A l'ombre de la terrasse d'une maison dans laquelle Karen venait se réfugier lorsque les ennuis la poursuivaient, Clara raconte à Meryl Streep et aux lecteurs les années qui ont conduit Karen Blixen à la faillite et son retour au Danemark.

Dans la deuxième partie, Dominique de Saint Pern se concentre alors sur l'effondrement d'une femme qui avait tout donné à sa ferme. Karen Blixen, la chasseresse, la planteuse de café, la protectrice de ses kikuyus, la femme aimée par Denys Finch Hatton ne cesse de voir le sol s'effondrer sous ses pas et perd tout ce qui lui permettait de vivre: sa ferme, son amour et sa liberté. Loin du très beau film de Pollack Out of Africa, Dominique de Saint Pern ne nous raconte pas l'apogée de la vie de cette aventurière et de cette amoureuse passionnée mais elle nous relate son lent déclin et ses multiples renonciations. Elle nous dresse le portrait d'une femme ruinée mais héroïque qui se bat pour défendre les droits de ses gens et qui accepte de perdre l'homme qu'elle aime au profit d'une autre avec dignité. Karen et Denys ne forment plus le couple idéalisé par le cinéma américain mais leur histoire passée et revécue par Karen jusqu'à la fin de sa vie n'en reste pas moins flamboyante.

Dans la troisième partie du roman, le lecteur assiste à la résurrection du phénix qui renaît de ses cendres. Karen Blixen ne peut plus être l'aventurière qu'elle a été, elle doit alors se trouver un nouveau masque et s'inventer de nouveau comme un auteur pourrait le faire pour ses personnages. Au Danemark, elle travaille sur son propre personnage de conteuse aristocrate et de sorcière qui envoûte les jeunes poètes des environs. Karen Blixen devient alors le grand auteur nobélisable. Dans sa vie privée, elle joue les tyrans et les protectrices. Elle tyrannise Clara, sa secrétaire, elle passe un pacte digne du diable avec un jeune poète danois et elle manipule son monde comme un marionnettiste pourrait le faire avec ses marionnettes selon Dominique de Saint Pern. La dernière partie du roman relate le déclin physique de l'auteur et sa gloire américaine.

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J'ai adoré ce roman qui se lit avec beaucoup de plaisir. L'auteur a choisi de ne pas aborder certains moments de la vie de Karen Blixen, j'étais donc contente d'avoir lu cet été la très riche et complète biographie de Judith Thurman qui me permettait de compléter les manques que d'autres lecteurs ont pu avoir. J'ai beaucoup aimé la construction du roman et la plume de Dominique de Saint Pern.

J'ai eu la chance de visiter la maison de Karen Blixen au Danemark cet été et j'ai vraiment adoré pouvoir visualiser les différentes pièces et le parc décrits par la romancière. Baronne Blixen m'a également permis de faire un voyage dans le temps et j'avais l'impression d'être de nouveau dans la maison de Karen Blixen !

Pour conclure, si vous aimez les romans d'aventures, les romans d'amour et si vous aimez lire des destins de femme flamboyants, ce très beau roman ne peut que vous plaire !

" L'Afrique, l'immense et somptueuse Afrique, lui ouvrait ses bras. Une petite voix lui avait bourdonné au fond de sa tête: "L'Afrique aura raison de tes lunes noires." Alors, elle sut. Elle était arrivée quelque part, il lui serait enfin possible d'appartenir à un endroit, d'y posséder une maison à elle. Une poignée de minutes avait suffi pour savoir qu'entre elle et ce pays totalement inconnu des liens se tisseraient dont il lui avait été impossible d'imaginer la force."

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(Photographie de la maison de Karen Blixen au Danemark, visitée cet été)

Lu dans le cadre d'une lecture commune avec Claire !

Fanny

25/02/2015

Wild, Cheryl Strayed

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Dans Wild, Cheryl Strayed fait parcourir aux lecteurs les chemins sombres de son passé et ceux épuisants mais lumineux du Pacific Crest Trail.

Le Pacific Crest Trail ou en français le Chemin des Crètes du Pacifique est un chemin de randonnée qui débute à la frontière mexicaine et qui se termine à la frontière canadienne. La vie de Cheryl est sens dessus dessous, plus rien ne va et elle accumule les malheurs: le décès de sa mère bien aimée, la dislocation de sa famille, l'éloignement de son frère et de sa soeur, son divorce et ses soirées où se mêlent drogue et relations sexuelles avec des inconnus. Cheryl est au bout de tout et d'elle-même: elle ne supporte plus ni son mode de vie ni elle-même. Elle se lance alors dans une longue marche qui doit durer plus de trois mois et la faire traverser plusieurs Etats. Cette marche de la dernière chance et de la rédemption doit lui permettre de vaincre son passé et de dompter le fantôme de sa mère. Les paysages arides, désertiques et enneigés défilent sous les yeux du lecteur qui a la chance de voyager avec Cheryl. Le lecteur partage tout: ses pieds souffrent lorsque les ampoules et les ongles noircis empêchent Cheryl de marcher, il a peur lorsque des inconnus douteux l'abordent alors qu'elle est seule en pleine forêt et meurt de soif lorsque notre héroïne ne trouve pas de points d'eau en plein désert. Cheryl Strayed nous permet d'effectuer avec elle un magnifique et inoubliable voyage. C'est un vrai coup de coeur pour moi!

Ce roman est tellement plaisant à lire ! Que cela fait du bien de suivre une telle héroïne ! Les émotions que suscite ce roman sont diverses et le lecteur ne peut pas rester de marbre. Il est ému, profondément triste lorsque Cheryl se souvient de son passé chaotique, il admire l'héroïne lorsqu'elle ne cesse de repousser ses limites sur le chemin et il est plein d'espoir à la fin du roman. Je conseille ce roman à tous les aventuriers, qu'ils le soient réellement ou qu'ils rêvent de péripéties lorsqu'ils rentrent fatigués et lassés du travail, à tous les amoureux de la nature et à tous ceux qui aiment les histoires lumineuses. 

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J'ai pu voir le film avec une exceptionnelle Reese Witherspoon dans le rôle de l'auteur et je l'ai bien aimé! Le roman est plus marquant mais le film est fidèle et provoque également toutes ces émotions variées chez le spectateur.

Avez-vous lu le roman ou vu le film? Qu'en avez-vous pensé?

Fanny

28/01/2015

Le livre d'un été, Tove Jansson

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Sophie a perdu sa maman à sa naissance et depuis elle vit ses étés avec son père et sa grand-mère dans une cabane sur une île du golfe de Finlande. Elle est alors en harmonie avec la nature et les animaux. Elle vit pleinement et ses sens se développent grâce à sa grand-mère qui lui apprend à ressentir et à voir ces belles petites choses que nous ne voyons plus véritablement. Rien ne se passe réellement dans ce roman qui est à la fois un roman initiatique et un conte dédié à la nature. Cette grand-mère, sorte de sorcière bienveillante et bienfaisante, passe le flambeau de l'amour de la nature à Sophie et ne renonce pas à des aventures sur l'île malgré son âge. Sa complicité pudique avec sa petite fille est très touchante. Malgré sa fatigue, elle suit sa petite fille dans ses découvertes, l'accompagne et lorsqu'elle ne le peut pas elle revit à travers elle ses années passées et ses souvenirs. Ensemble, elles mangent le monde à pleines dents.

Le début de ce roman est atypique et nous déroute: les chapitres se suivent sans lien perceptible en décrivant les observations et activés de l'enfant et de la grand-mère sur cette île. Elles reconstruisent Venise avec des allumettes et bouts de bois dans le marais à côté de la maison, Sophie écrit un livre sur les vers de terre, elles plantent des fleurs, cherchent le dentier de la grand-mère tombé dans les fleurs ou écoutent les oiseaux. La curiosité de l'enfant fait naître des conversations graves qui ont pour sujet la mort, l'oubli, la vieillesse et Dieu.

Ce court roman de la Finlandaise Tove Jansson (très connue pour ces romans enfantins et pour les personnages des Moomins) n'a pas été sans me faire penser à certains écrits de Colette. Comme chez l'auteur française, l'enfance et l'amour de la nature ont la part belle dans ce roman. Le roman ne plaira pas à tous à cause de sa construction et d'une certaine simplicité. C'est justement cette simplicité qui est belle. La pudeur des personnages, leur complicité qui dépasse les mots et qui n'est visible qu'à travers leurs gestes et leur sensibilité font de ce roman une oeuvre douce et touchante à découvrir.  

 

" Elle demanda comment Dieu pouvait faire attention à tous les gens qui le priaient en même temps.
- Il est très sage, murmura la grand-mère en somnolant sous son chapeau .
- Réponds correctement, dit Sophie . Comment a-t-il le temps?
- Il a des secrétaires ...
- Mais comment arrive-t-il à exaucer votre prière s'il n'a pas le temps de parler avec ses secrétaires avant que ça ne tourne mal?
Grand-mère fit semblant de dormir, mais elle savait bien qu'elle ne trompait personne et, finalement elle déclara qu'il s'était arrangé pour que rien ne puisse arriver entre le moment où on priait et celui où il recevait votre prière. Mais sa petite fille demanda alors ce qui arrivait quand on tombait d'un sapin et qu'on priait pendant qu'on était en l'air."

Fanny

18/01/2015

Mille femmes blanches, Jim Fergus

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Septembre 1874. Little Wolf, chef d’une tribu cheyenne, rencontre le président américain Ulysses S. Grant et lui propose d’échanger mille chevaux contre le même nombre de femmes blanches. L’objectif du chef cheyenne est de faire de ces femmes des épouses pour son peuple, dont la descendance, grâce au métissage, favoriserait l’intégration au sein du peuple américain. Si officiellement les autorités américaines se disent choquées par la proposition, en coulisse le rassemblement de femmes blanches « volontaires » s’organise. Certaines femmes sont recrutées grâce à une annonce promettant aventure et exotisme à de jeunes femmes désireuses de se marier ; mais l’essentiel des effectifs est en réalité puisé dans les prisons et asiles. Parmi ces femmes il y a May Dodd, 25 ans. Issue d’une riche et importante famille, May a été placée en asile par son père pour être tombée amoureuse de l’un de ses contremaîtres, avoir vécu avec lui hors des liens du mariage et donné naissance à deux enfants. En se portant volontaire pour cette « mission », May voit surtout un moyen de s’échapper de l’asile et de fuir les mauvais traitements qu’elle y subit. Les femmes s’engagent à intégrer une tribu indienne pour deux années à la fin desquelles elles seront libres de rejoindre la civilisation. Pour May il y a donc au bout de ces deux années un espoir de liberté et la possibilité de retrouver ses enfants.

Nous suivons le destin de May ainsi que celui de ses compagnes au travers de carnets dans lesquels May écrit des lettres pour sa famille et y décrit l’aventure dans laquelle elle se retrouve embarquée. Ces femmes, sans trop savoir ce qui les attendent, entament un incroyable voyage pour aller à la rencontre de leurs futurs époux indiens dont elles ignorent tout du mode de vie, des croyances et coutumes mais aussi de la langue. Si May et ses compagnes croient tout d’abord, comme il leur a été expliqué, qu’elles ont un rôle à jouer dans l’intégration des Indiens, en leur apportant la « culture » et le « savoir », elles vont vite se retrouver totalement oubliées et perdues derrière les conflits entre les forces américaines et les Indiens. Quelques mois après l’intégration de ces femmes au sein des tribus indiennes, les relations entre Indiens et Américains se détériorent du fait des enjeux de la possession des territoires Black Hills. Les Américains ont découvert que ces territoires offrent beaucoup d’or et souhaitent donc en déloger les Indiens pour les installer dans des réserves. Au sein de cette guerre des territoires, difficile pour ces femmes de savoir quelle est leur identité…

J’ai beaucoup apprécié ma lecture car elle m’a permis d’entamer un véritable voyage dans le temps mais aussi vers les territoires indiens d’Amérique et de découvrir de petits bouts du mode de vie, des croyances ainsi que des traditions indiennes ce qui a été très intéressant. Ce roman est également marquant car Jim Fergus nous offre des portraits de femmes incroyables que j’ai eu plaisir à suivre tout au long du roman. On s’attache bien sûr à la courageuse May dont on suit les aventures le plus en détails du fait de la forme de journal de ses carnets de lettres, mais ses compagnes sont tout aussi marquantes et attachantes. A travers chacune d’elles on découvre des réactions, intégrations et évolutions différentes au cœur de la tribu.

Le récit de Jim Fergus est une fiction. Little Wolf a bien rencontré le président Ulysses S. Grant mais l’échange de ces mille femmes blanches est imaginé par l’auteur. Le récit n’en est pas moins tout à fait prenant et l’auteur nous offre ici une très belle lecture !

Emilie

14/12/2014

Cris, Laurent Gaudé

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En superposant les courts récits de nombreux soldats, Laurent Gaudé dresse un immense tableau de tous ces hommes sacrifiés et magnifiques.

Il nous donne à entendre la voix d'une multitude de soldats et d'un médecin. Qu'ils quittent les tranchées, qu'ils prennent la relève, qu'ils traquent un soldat fou qui hurle à la mort, qu'ils tuent, qu'ils sauvent, qu'ils soignent ou aident à mourir; ces hommes nous racontent leurs petites histoires qui participent à la Grande histoire de la première guerre mondiale. Tout commence lorsque Jules, honteux, quitte les tranchées sans prévenir ses amis, Marius et Boris, qui ne peuvent quitter le front. En traversant les boyaux, il croise la relève et ces nouveaux soldats confient leurs peurs et leur inexpérience au lecteur.

Les voix de ces hommes touchent le lecteur au cœur. Tout comme Jules, il entendra encore longtemps, une fois le livre fermé, les voix des camarades des tranchés ou sera hanté comme Boris et Marius, par ces cris inhumains de cet homme-animal vivant dans le no man's land. Les phrases très courtes et hachées de Laurent Gaudé percutent le lecteur.

J'ai particulièrement aimé la construction du roman qui nous donne à lire le récit de soldats présents tout le long du roman mais aussi pour quelques pages seulement. L'auteur semble ainsi prêter sa voix à des anonymes, que les soldats eux-mêmes oublient dans le roman, à l'image du gazé qui agonise dans un trou d'obus et que les soldats ont oublié en se disant qu'il était certainement mort et qu'il ne servait à rien de risquer sa vie pour aller le chercher.

Cris est un long chant poignant et émouvant mais aussi une immense statue dressée à la mémoire de tous ces hommes. Ce roman est un coup de poing au cœur et au ventre qui laisse le lecteur sonné et ému.

"Je mets des pansements sur les morts et j'ampute les vivants. Il y a trop de cris autour de moi. Je n'entends plus les voix. Et je me demande bien quel visage a le monstre qui est là-haut, qui se fait appeler Dieu, et combien de doigts il a à chaque main pour pouvoir compter autant de morts."

"Je ne pensais pas que la mort pouvait avoir le visage d’un gamin de dix-huit ans. Ce gamin-là, avec ses yeux clairs et son nez d’enfant, c’était ma mort."

"Je ne sais pas ce qui peut produire les cris dont tu parles et que j'ai moi-même entendus, animal ou homme. Je ne sais pas si ce sont des lamentations ou les fous rires d'une bête sauvage. On dit que c'est un soldat, aliéné lors d'une attaque, qui n'a jamais retrouvé ses lignes et qui erre en nous insultant, nous qui n'avons jamais rien fait pour le retrouver. Personne ne peut dire si c'est un Allemand ou un Français. Personne ne peut dire de quoi il vit et où il se terre. Certains affirment que c'est le fantôme écorché du champ de bataille. Qu'il vient hurler à nos oreilles, la nuit, pour nous rappeler nos meurtres du jour."

Fanny

Ps: Merci à ma soeur, admiratrice de Gaudé, qui m'a conseillé ce roman !

Lu dans le cadre du challenge Première guerre mondiale organisé par Claire !

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