Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

26/02/2018

Anna Karénine, Léon Tolstoï

IMG_20180226_141918_171.jpg

J'ai passé mon mois de février avec Anna Karénine de Léon Tolstoï. Depuis plusieurs années, j'avais un peu peur de me lancer dans la lecture de ce pavé et c'est finalement l'idée de Romanza qui m'a donnée envie de franchir le pas. Romanza nous a proposé de lire ou relire Anna Karénine et de regarder certaines adaptations. De mon côté, j'ai prévu de regarder dans les semaines à venir l'adaptation de 1948 avec Vivien Leigh et celle de 2012 avec Keira Knightley. 

Le début de ma lecture a été difficile et j'avais bien du mal à comprendre pourquoi je n'accrochais pas trop malgré certaines pages sublimes comme la rencontre de Vronskï et Anna à la gare. J'ai finalement compris que le roman ne m'apportait pas ce que j'attendais et que j'avais une mauvaise représentation de l'oeuvre. Je croyais qu'Anna était vraiment l'héroïne incontestée du roman, la place que prenait Lévine me gênait. Je pensais également que le début de la relation entre Vronskï et Anna serait davantage décrit. J'ai souvent entendu Anna comparée à Emma Bovary mais de mon côté je les trouvais très différentes. Une fois que j'ai compris ce qui me gênait dans le début du roman, je me suis plongée complètement dedans et je l'ai adoré. 

27972255_1571265796324109_8067189388030713547_n.jpg

Anna Karénine n'est pas que l'histoire d'une femme adultère qui refuse de mentir, de se cacher quitte à subir la déchéance et le rejet d'une l'aristocratie hypocrite comme on a tendance à le croire. Dans ce roman, Tolstoï représente toute la vie, évoque tous les thèmes possibles et représente tous les humains. Anna n'est pas la seule héroïne, elle partage le haut de l'affiche avec une multitude de personnages: Lévine l'amoureux de la nature qui cherche à comprendre le sens de sa vie et veut devenir un homme bon, Alexis, le mari tour à tour compréhensif et sans pitié, Vronskï le séducteur, puis l'amant regrettant sa liberté passée, la jeune Kitty qui fait son éducation sentimentale durant le roman, Stepan, le frère d'Anna cherchant à jouir de tous les plaisirs de la vie.... Anna Karénine est une sorte de monument représentant toutes les vies possibles: le peuple et l'aristocratie russes, l'amour heureux et l'amour passionnel destructeur, le travail manuel et celui de l'esprit, la foi et l'impiété, la naissance et la mort. 

L'écriture de Tolstoï est magnifique et la fin, même si l'on connaît déjà le dénouement, est inoubliable.

" Il se meurt. Au printemps, il mourra... Que puis-je faire pour le soulager ? Que puis-je lui dire ? Que sais-je ? N'avais-je pas moi-même oublié qu'il faut mourir. "

" La tempête grondait dans son âme, elle se sentait à un tournant de sa vie, qui pouvait avoir pour elle les plus terribles conséquences, et cependant elle devait feindre devant un étranger, lequel tôt ou tard saurait tout... Domptant la tempête intérieure qui la dévastait, elle s'assit et se mit à causer avec le nouveau venu. "

Fanny

Lu dans le cadre du Challenge Un Hiver avec Anna Karénine chez Romanza et le Challenge XIXe siècle chez Fanny

                   

            3749469554.png    1875train_neige.jpg

10/10/2017

Le destin d'Anna Pavlovna, Alekseï Pisemski

IMG_20171007_152624_475.jpg

Alekseï Pisemski est un contemporain d'Ivan Tourgueniev peu connu en France. C'est avec un grand plaisir que j'ai découvert cet auteur russe avec Le destin d'Anna Pavlovna.


Alekseï Pisemski plonge le lecteur dans la Russie rurale du XIXe siècle. Nouvellement mariée, l'héroïne s'installe avec son époux dans un petit village organisé par quelques nobles, propriétaires de domaines. Malade, fragile, brutalisée par son mari, Anna Pavlovna dépérit alors que toute la petite noblesse provinciale se régale de commérages. Deux hommes de son passé ressurgissent alors dans sa vie: elle retrouve un vieux comte, ami de son père qui tombe follement amoureux d'elle et un jeune homme sans le sous qu'elle a aimé dans sa jeunesse et tout cela sous l’œil jaloux de son époux. Ces retrouvailles vont bouleverser sa vie. 


J'ai beaucoup aimé ce roman qui ressemble énormément à une tragédie. L'héroïne semble poursuivie par des puissances qui la dépassent et qui prennent diverses formes: la petite noblesse qui s'ennuie, qui fait et détruit des réputations et des êtres au gré de ses commérages mais aussi les hommes tout puissants au XIXe qui ne sont guidés que par des pulsions dévastatrices. Anna Pavlovna, héroïne courageuse, ressemble alors à une marionnette aux mains d'hommes capricieux, lâches et inconstants. Dans Le destin d'Anna Pavlovna, Alekseï Pisemski offre au lecteur un beau portrait de femme du XIXe siècle. Il nous donne aussi le reflet d'une Russie cruelle à observer : une société rurale dans laquelle les hommes fortunés régentent et détruisent selon leur bon vouloir la vie des "âmes" qu'ils possèdent : celles de leurs serfs et des femmes.

Je remercie Babelio et Les Editions Ateliers Henry Dougier pour cette belle découverte !

Lu dans le cadre du Challenge XIXe siècle organisé par Fanny

Fanny

Logo_HenryDougier.jpg    2843307054.png   logo-4.png

17/09/2016

Le témoignage du pendu, Ann Granger

14202484_1057603694356991_2895613145401687921_n.jpg

Le témoignage du pendu est le cinquième volume des enquêtes de Benjamin et Elizabeth Ross. Mills, un condamné à mort, demande comme dernière volonté de s'entretenir avec l'homme qui l'a arrêté: Benjamin Ross. Avant de mourir, il veut soulager sa conscience : pendant dix-sept il a gardé le silence mais aujourd'hui il veut témoigner sur un crime dont il a été le témoin. Piégé par l'orage en pleine campagne, Mills chercha refuge dans la seule maison des alentours. Il s'approcha de cette maison et aperçut par la fenêtre un vieil homme se faire tuer par une jeune femme. Effrayé, il fuit et se tut pendant dix-sept. Benjamin Ross ne sait que penser: Mills dit-il la vérité ou est-ce une astuce pour retarder sa condamnation à mort? Lizzie se propose alors pour retourner sur les lieux, retrouver cette maison et le nom de la victime. Alors que Mills est exécuté et que le couple Ross espère trouver assez de preuves pour ouvrir officiellement l'enquête, Monsieur Canning, bourgeois londonien, déclare que sa femme et sa fille ont été enlevées par des malfaiteurs à la recherche d'une rançon. Le doute s'installe dans l'esprit de Benjamin: il pense avoir aperçu la veille cette femme et son enfant dormant sous un pont de Londres. Benjamin et Lizzie devront alors résoudre deux mystères : comprendre la disparition de Madame Canning et Charlotte afin de les retrouver vivantes et trouver des preuves pour confondre une meurtrière qui a échappé à la justice pendant dix-sept ans.

Ce cinquième tome est, selon moi, le moins réussi de tous. Mon ressenti est mitigé: j'étais ravie de retrouver ce couple pour une nouvelle enquête et l'ambiance de l'Angleterre du XIXe siècle décrite par Ann Granger me plait toujours autant. Mais cette double intrigue ne m'a pas convaincue. Le début était prometteur mais la disparition de Madame Canning et sa fille vient se greffer à la première enquête sans apporter de véritable intérêt à l'histoire. L'enquête de la disparition est intéressante parce qu'elle décrit la condition féminine et les malheurs que les femmes du XIXe siècle devaient fatalement subir. Mais elle n'est pas intéressante en elle-même et elle est vite résolue par le lecteur. L'intrigue concernant le meurtre vieux de dix-sept est plus palpitante mais elle s'essouffle à cause de la seconde enquête qui l'a ralentie. Enfin, Lizzie Ross n'est pas assez présente à mon goût.
J'espère que cette petite déception avec Le témoignage du pendu sera effacée par un sixième volume qui aura les qualités des volumes précédents !

Fanny

Lu dans le cadre du challenge XIXe siècle chez Fanny et de A year in England chez Titine.

                                     13567018_10210036716705510_2905431851464497278_n.jpg                3749469554.png

19/05/2016

La Cuisinière, Mary Beth Keane

13164469_963330110451017_5619971429170112139_n.jpg

1899. New-York. Mary Mallon, cuisinière de son état, s'occupe du petit Kirkenbauer qu'elle aime beaucoup et qui souffre de fièvres alors que sa mère a elle-même attrapé la typhoïde. L'enfant et la mère décèdent et Mary quitte son emploi. Commence alors pour Mary un long parcourt de cuisinière qui l'a fait passer d'années en années au service de riches familles, recevant du beau monde et faisant de la cuisine de Mary leur fierté. Ces années sont passées sous silence dans le roman et cette ellipse nous amène directement au jour de l'arrestation de Mary, suspectée d'avoir volontairement transmis la typhoïde à de nombreux membres des familles pour lesquelles elle a travaillé. Interrogée comme une criminelle, étudiée comme un cas unique, analysée comme un cobaye, enfermée comme un animal dangereux, Mary est méfiante, agressive et ne comprend pas ce qu'il se passe. Oubliée par son conjoint, observée par les journalistes, les docteurs et la population new-yorkaise toute entière Mary devra alors lutter pour retrouver sa liberté et prouver son innocence. Ce résumé ne concerne que les premières centaines de pages du roman mais pour ne pas trop vous en dire je m'arrête ici !

Les recherches de Mary Beth Keane pour reconstituer si finement la vie de Mary Mallon, surnommée la porteuse de germes ou Mary Typhoïde et pour installer une atmosphère et un décor si précis doivent être titanesques. Ce livre semble ne rien laisser au hasard ou à l'imagination de Mary Beth Keane même s'il ne s'agit pas d'une biographie mais d'un roman. J'ai apprécié la description des conditions de vie misérable des hommes et des femmes de cette époque ou encore les allusions aux grands événements de l'époque comme l'incendie qui tua de nombreuses ouvrières dans une usine ou le naufrage du Titanic. L'aspect documentaire du roman est très intéressant.

typhoid-mary-mallon-newsp.jpg

Le début du roman est très accrocheur et la fin contient de nombreux rebondissements mais je dois bien admettre que j'ai trouvé certains passages bien trop longs. Afin de se faire un avis sur la culpabilité ou l'innocence de Mary, les médecins, juges et journalistes étudiaient à la loupe sa vie privée mais j'ai trouvé que la relation entre Mary et Alfred prenait trop de place dans le roman. Le rythme me semblait parfois trop lent, peut-être que j'attendais trop du roman. Ma lecture a donc traînée et ce n'est pas un bon signe ! Le destin de Mary Mallon est incroyable et parfaitement digne d'un roman mais il manque quelques petites choses pour transformer ce livre en une véritable réussite, peut-être un peu plus de rythme ou une héroïne un peu plus attachante.

Vous l'aurez compris je suis un peu déçue par cette lecture même si elle n'est pas totalement négative.

Lu dans le cadre de la lecture commune organisée par Fanny pour le challenge XIXe siècle.

Fanny

3749469554.png

 

07/04/2016

Jude l'obscur, Thomas Hardy

12523949_936367513147277_254239251695428282_n.jpg

Après mon coup de coeur pour Tess d'Urberville et avant d'aller visiter le sud de l'Angleterre d'ici quelques jours, j'ai voulu lire le dernier roman de l'auteur, considéré comme l'ultime chef d'oeuvre de Thomas Hardy : Jude l'obscur, roman à ne pas mettre en des mains tristounettes sans prendre le risque de les rendre encore plus désespérées.

Je ne vous raconterai pas toute l'histoire de Jude, tout d'abord le roman perdrait de son intérêt et je ne suis pas certaine de lui rendre justice. (Mieux vaut ne pas lire la quatrième de couverture du Livre de poche.)

Nous pouvons juste esquisser les premières fondations du roman qui sont si importantes pour la suite. Jude, un jeune orphelin, vit chez sa tante et travaille pour ne pas être considéré comme une bouche inutile à nourrir par sa parente. Lorsque son maître d'école quitte le village au début du roman, il lui fait promettre de ne jamais abandonner ses études et de toujours chercher à se cultiver. Jude fait cette promesse qui va orienter son destin. Dès lors, Jude n'a qu'une obsession: aller à Christminster, ville universitaire et pieuse, pour devenir quelqu'un : un homme cultivé, intelligent, affranchi de la terre et de la misère. Il n'aura de cesse de tendre vers cet objectif mais de nombreuses barrières se dresseront devant lui.

Ces obstacles seront extérieurs: la société telle qu'elle est au XIXe siècle ne permet pas à un petit jeune homme obscur de devenir un grand homme, ne donne ni temps ni forces à un travailleur manuel usé par ses journées de labeur pour s'instruire. De plus, cette société est est composée d'hommes et de femmes rongés par les préjugés, le fanatisme religieux, l'hypocrisie, nourris de scandales, de ragots et qui aiment plus que tout juger leur prochain. Les difficultés rencontrées par Jude seront également liées à sa propre personnalité: sa faiblesse pour l'alcool, sa sensualité qui le pousse dans les bras d'Arabella, sa passion pour Sue, ses propres préjugés et croyances religieuses joueront également contre lui et contre son idéal. Enfin, la pensée de Jude se trouvera confrontée à celle de Sue, sa cousine. Les idées de Jude en seront chamboulées: Jude est croyant, considère les cérémonies et lois religieuses comme sacrées. Sue, plus libre et indépendante que son cousin, est cultivée et possède un esprit critique aiguisé. Sans jamais le dire, ses faits et gestes montrent qu'elle ne croit pas en Dieu et elle rejette les institutions religieuses.

Jude l'obscur est une tragédie moderne : comme chez les Grecs, le "fatum", le destin se joue des personnages. Ils sont quatre: Jude, Sue sa cousine, Arabella une jeune paysanne et Richard un instituteur. Il seront désespérément liés, séparés et amenés à se rencontrer sans cesse au fil du roman. Ils subiront chacun leur tour les choix des autres personnages, le regard et les jugements de leurs contemporains et les nombreux pièges que la société du XIXe siècle tend à l'homme tout au long de sa vie pour le contraindre, le soumettre et anéantir sa liberté: le mariage et la religion. Sue et Jude, couple maudit, ont "cinquante ans d'avance sur leur monde". Influencé par Sue, Jude rejettera les lois sociales et religieuses auxquelles il se soumettait. Ils n'auront de cesse de chercher leur propre bonheur. Petits voiliers pris dans une tempête, ils se battront contre vents et marées pour vivre selon leur bon vouloir et selon leurs propres lois édictées contre celles imposées par la société.

Jude l'obscur a causé tant d'ennuis à Thomas Hardy qu'il n'a plus écrit un seul roman jusqu'à la fin de sa vie. Les thèmes et les propos tenus par les personnages sont résolument modernes. Le roman est une vive critique des lois et de l'institution du mariage. Le mariage n'est qu'une question d'hypocrisie: deux personnes ne peuvent pas ressentir exactement les mêmes sentiments tout au long de leur vie et lorsque ces sentiments sont contraints ils se délitent fatalement. Dieu et les hommes ne devraient pas forcer un couple à se marier.

Pour conclure, parce que si je ne m'arrête pas maintenant, cet avis sera beaucoup trop long, Jude l'obscur est un roman complexe et dense qui s'empare de nombreux sujets qui sont toujours d'actualité. Me mariant moi-même cette année, je n'ai pu rester insensible à toutes les réflexions des personnages concernant cette institution. Cette tragédie est souvent bouleversante même si elle connaît quelques longueurs. Jude l'obscur m'a moins touché que Tess d'Urberville, je dois bien l'admettre. L'écriture de Thomas Hardy est toujours aussi belle et la construction de ses intrigues et leurs rebondissements restent incroyables. Je reste sans voix devant l'audace et la modernité des idées et des critiques de Thomas Hardy qui a toujours des années d'avance pour certains esprits obscurs de 2016.


" Jude sortit, conscient plus que jamais de l'inutilité de son existence ; il s'étendit sur un tas de litière près de l'étable à cochons. Le brouillard était alors devenu plus léger et laissait deviner le soleil. L'enfant tira son chapeau de paille sur son visage et rêvassa, en regardant par les interstices cette clarté blanchâtre. Il voyait que l'âge apporte des responsabilités. Les événements ne s'enchaînaient pas comme il l'aurait pensé. La logique de la Nature était trop horrible pour qu'il s'en souciât. L'idée que ce qui était compassion envers certaines créatures devenait cruauté envers d'autres détruisait tout sentiment d'harmonie. Il s'apercevait qu'en grandissant on se sentait au centre de la vie et non sur un point de la circonférence comme lorsqu'on est petit : cela lui donnait le frisson. Tout autour de lui, il semblait y avoir des choses brillantes, éclatantes, assourdissantes ; ces lueurs et ces bruits frappaient cette petite cellule qui sécrète la vie, la secouaient et la brûlaient. "

Lu dans le cadre du challenge XIXe siècle chez Fanny et de A year in England chez Titine.

Fanny

      logo-4.png              3625681909.jpg

 

 

26/02/2016

Docteur Glas, Hjalmar Söderberg

9782369142409.jpg

Stockholm, fin du XIXe siècle. Le Docteur Glas tient un journal intime dans lequel il retranscrit sa vie quotidienne, revient sur son passé ou s'interroge sur Dieu, la mort ou l'amour. Il a l'habitude de croiser le chemin de femmes désespérées qui implorent son aide, le plus souvent pour faire disparaître un enfant indésiré. Ses oreilles ne sont pas attentives à ces discours, il ne se laisse pas toucher et se cache toujours derrière son devoir de médecin pour ne pas aider ces jeunes femmes et ne pas risquer de perdre son métier. Lorsque Madame Gregorius lui demande son aide, le docteur change de position. Madame Gregorius est une jeune femme pieuse mariée à un vieil homme qu'elle n'aime pas et n'a jamais aimé. Il est pasteur et elle a cru, en l'épousant, calmer ses troubles. Son mariage n'a fait que les accroître: elle ne le supporte plus physiquement et elle est tombée dans les bras d'un autre. Elle demande alors au docteur de l'aider à éviter tout contact avec son époux. Pris de pitié et surtout charmé par ses atouts, le docteur accepte de faire une exception et l'aide à fuir les bras de son mari. Le docteur finira par s'immiscer plus qu'il n'est convenable dans ce couple en étant le confident de l'épouse désespérée et du mari frustré. Il aime Helga Gregorius et ne ressent petit à petit pour le pasteur Gregorius que haine et dégoût.

12747626_47487698.jpg

Passé après la lecture de Tess d'Urberville n'est pas une mince affaire mais Hjalmar Söderberg a su relever ce défi. Ce court classique suédois m'a fait penser aux nouvelles de Stefan Zweig. La brièveté du récit n'enlève rien à la densité de l'intrigue ou à la profondeur du héros. Ce "triangle amoureux" sordide est parfois gênant mais il est très intéressant. Aucun des personnage n'est à proprement parler attachants, mais paradoxalement, les interrogations sur le monde, sur la morale, sur la littérature ou sur la vie notées par le docteur dans son journal intime nous touchent et nourrissent nos propres réflexions. Elles sont tour à tour amères ou mélancoliques mais elles sont toujours profondes et souvent modernes pour le XIXe siècle. Ainsi le héros a des opinions très arrêtées sur la religion ou l'euthanasie. Enfin, j'ai aimé déambuler avec le docteur Glas dans Stockholm, une ville que j'ai beaucoup aimée lorsque je l'ai visitée il y a quelques années.
J'ai passé un très bon moment avec ce classique suédois qui est atypique.


Je te remercie vivement Babelio et les Editions Libretto pour cette belle découverte !

" Et depuis quelques temps, j'incline à croire qu'il n'y a sans doute aucune raison à ce que l'on comprenne la vie. Cette rage d'expliquer et de comprendre, cette chasse de la vérité n'est qu'une erreur. Nous bénissons le soleil parce que nous vivons à une telle distance de lui qui nous est utile ; mais quelques millions de kilomètres plus près ou plus loin, nous serions gelés ou consumés. S'il en était de la vérité comme du soleil ? "Celui qui contemple la face de Dieu doit mourir", dit le vieil adage finlandais, et Oedipe, après avoir résolu l'énigme du Sphinx, devint le plus malheureux des hommes."

" Mesure en toute humilité ton état, ta condition d'habitant de la terre. Alors la vie deviendra quelque chose d'important et la nuit sera éternelle et profonde."

Fanny

Lu dans le cadre du Challenge XIXe siècle chez Fanny.

 

logo2.jpg             2843307054.png     9b4n.jpg

 

                         

20/02/2016

Tess d'Urberville, Thomas Hardy

12662463_906078599509502_6016974635554841100_n.jpg

Ivre, John Durbeyfield rentre la nuit chez lui lorsqu'il croise le pasteur de la région qui lui apprend qu'il est un descendant d'une illustre famille désormais éteinte: les d'Urberville. John n'a alors qu'une obsession: retrouver le prestige de ses ancêtres et le rang auquel il estime avoir droit. Ainsi, il n'hésite pas à faire culpabiliser sa fille qui a commis la faute de s'endormir en route et d'avoir eu un accident avec le cheval afin de l'envoyer chercher du travail auprès des derniers d'Uberville puissants de la région. Tess travaille et vit chez Alec d'Urberville et sa mère. Alec d'Urberville est un dangereux séducteur qui mènera Tess à sa perte.

Tess décide de fuir Alec malgré les voeux de ses parents qui souhaitent la marier à Alec. Tess, considérée comme impure par la société, sujet de ragots dans le village et jugée idiote par ses parents, trouve un travail dans une laiterie et essaie de se faire oublier. Elle rencontre alors de jeunes laitières qui vont devenir ses amies mais aussi Angel Clare, un fils de pasteur qui souhaite devenir fermier et qu'elle a déjà croisé des années auparavant.

Tess d'Urberville a tout pour séduire et fut un véritable coup de coeur pour moi. Tout est beau et tragique dans ce roman. Tout d'abord, l'Angleterre du Sud est magnifiée par Thomas Hardy qui décrit de vastes paysages et des scènes champêtres dans lesquelles, loin des clichés, les paysans ne sont pas des idiots lourdauds. Les personnages sont riches et notre regard ne cesse de se paufiner sur leur caractère. Tess est une héroïne qui force le respect: sa générosité, sa force de caractère et son abnégation sont sans failles. Angel Clare et Alec d'Urberville sont les deux personnages masculins opposés: l'un cherche la pureté, l'autre pourrait être la figure du diable. Les deux hommes sont intéressants pour le lecteur et bouleverseront l'existence de Tess. Les parents de Tess sont exaspérants et nous donnent des envies de meurtre.

Thomas Hardy nous livre une grande et belle tragédie. Le lecteur sait que l'histoire se terminera mal mais la fin reste surprenante et la fatalité a un grand rôle. La rencontre de Tess et d'Angel est et devait être trop tardive, Tess devait d'abord rencontrer Alec pour son plus grand malheur. C'est la fatalité qui poursuit Tess qui est constamment coupable: coupable d'avoir tué le cheval, coupable d'avoir eu une relation sexuelle avec Alec, coupable de mensanges et de calculs. Elle est forcément coupable parce qu'elle est née femme. Thomas Hardy nous montre la vie cruelle et injuste que menaient les femmes au XIXe siècle dans une société qui les malmenait. Pendant ma lecture je pensais sans cesse à la phrase de Hobbes: "l'homme est un loup pour l'homme" mais dans Tess c'est surtout l'homme qui est un loup pour la femme. Et certaines femmes, comme la mère de Tess, sont encore des loups pour leurs semblables. Enfin, Dieu n'est pas là comme le rappelle Thomas Hardy et rien ne va. Tess ne peut attendre aucune aide, ni des hommes intolérants ni d'un être tout puissant.

Après Loin de la foule déchaînée, j'attendais énormément de Thomas Hardy et je n'ai pas été déçue. Tess d'Urberville et l'écriture poétique de l'auteur sont de un véritables coups de coeur.

" Tout à coup, un après-midi, regardant sa beauté dans la glace, elle se mit à penser qu’il existait encore une date bien plus importante pour elle, la date de sa propre mort, quand ses charmes auraient disparu : jour caché, invisible et sournois parmi tous ceux de l’année, qui passait devant elle sans donner de signe et n’en était pas moins sûrement là. Quel était-il ? Pourquoi, quand venait chaque année, ne sentait-elle pas le frisson de cette froide et familière rencontre ?
Comme Jeremy Taylor, elle songeait que, dans l’avenir, ceux qui l’auraient connue diraient : « C’est le tant…, le jour où est morte cette pauvre Tess Durbeyfield », et ces mots ne leur sembleraient pas étranges. De ce jour destiné à être le terme de son voyage dans le temps à travers les âges, elle ne connaissait ni le mois ni la semaine ni la saison ni l’année."

J'espère pouvoir voir rapidement les versions de Roman Polanski et de la BBC. Les avez-vous vus ? J'aimerais également lire Jude l'Obscur d'ici peu.

Lu dans les cadres des challenges du XIXe siècle chez Fanny, des 100 livres à lire au moins une fois chez Bianca et A year in England chez Titine.

Fanny

logo-by-eliza1.jpg            challenge-des-100-livres-chez-bianca.jpg           2071237519.png