06/09/2016
Chaleur du sang, Irène Némirovsky
L'été dernier, j'avais lu et adoré Suite Française. J'avais été bien incapable de partager mon avis tant le roman était dense, riche et beau. Avec Chaleur du sang, roman plus court, je m'en sens à peu près capable.
Le roman se déroule dans les années 30 dans la campagne bourguignonne. Silvio, un vieil homme, assiste au mariage de Colette, la fille d'une amie, et de François. Le lecteur suit plusieurs couples : il y a Colette et François, fraîchement mariés, Brigitte, mariée à un vieil homme mais qui aime passionnément son amant Marc et Hélène et François, les parents de Colette, qui s'aiment comme au premier jour lorsque Hélène était encore l'épouse d'un premier mari. Les destins de ces trois couples sont tous entremêlés par des secrets qu'ils pensaient enfouis mais qui resurgissent lors d'un événement tragique qui affectera Colette et Françoise. Du haut de sa sagesse et sa solitude, Silvio, le narrateur, observe ces passions amoureuses et se souvient de sa propre jeunesse, à l'époque lointaine où il brûlait encore de cette "chaleur du sang", disparue pour lui aujourd'hui.
Ce roman est un tableau réaliste et acerbe de la campagne et des paysans qui n'est pas dénué de tendresse pour le monde rural. Chaleur du sang est une tragédie, celle de la jeunesse qui brûle et se consume dans ses amours et ses égarements et celle de la vieillesse qui se meure par manque de passions. Irène Némirovsky dresse un sublime portrait de la jeunesse et de la vieillesse. C'est également la tragédie de tout un village dans lequel tous les habitants semblent liés par un même destin inéluctable. L'événement tragique qui bouleverse la vie de ces trois couples parait inévitable au regard du passé de leurs ancêtres et de leurs secrets. L'écriture d'Irène Némirovsky est incroyablement belle, délicate et poétique. Je suis de nouveau sous le charme de l'intrigue, des personnages et de l'écriture d'Irène Némirovsky.
"Je ressemble à un faune : un vieux faune vraiment, qui ne court plus les nymphes, qui se cache au coin de son feu. Et comment décrire les plaisirs que j'y trouve ? Je jouis de choses simples et qui sont à ma portée : un bon repas, un bon vin, ce carnet où je me procure, en y griffonnant, une joie sarcastique et secrète ; par-dessus tout la divine solitude. Que me faut-il de plus ? Mais, à vingt ans, comme je brûlais !...Comment s'allume en nous ce feu ? Il dévore tout, en quelques mois, en quelques années, en quelques heures parfois, puis s'éteint. Après, vous pouvez dénombrer ses ravages. Vous vous trouvez lié à une femme que vous n'aimez plus, ou, comme moi, vous êtes ruiné, ou, né pour être épicier, vous avez voulu vous faire peintre à Paris et vous finissez vos jours à l'hôpital. Qui n'a pas eu sa vie étrangement déformée et courbée par ce feu dans un sens contraire à sa nature profonde ? Si bien que nous sommes tous plus ou moins semblables à ces branches qui brûlent dans ma cheminée et que les flammes tordent comme elles veulent."
Fanny
20:19 Publié dans Les classiques, Livres | Lien permanent | Commentaires (5)
Commentaires
Je n'ai pas encore osé attaquer cette autrice ...
Écrit par : Scarlett Julie | 06/09/2016
Il me tente beaucoup celui ci ! J'ai adoré Suite Française également
Écrit par : Natacha | 06/09/2016
C'est une romancière que j'apprécie également tout particulièrement et je suis ravie de la sortie de ce roman que je ne connaissais pas.
Écrit par : Titine | 07/09/2016
J'ai "suite d'automne" dans ma PAL (si je ne me trompe pas, j'ai léger doute sur le titre). Tu me donnes envie de découvrir enfin cet auteur qui me tente depuis longtemps.
Écrit par : Lou | 08/09/2016
Dans ta critique tu en dis peu mais assez alors je suis intriguée... J'ai lu "Suite française" récemment, en découvrant ainsi l'auteur. Il faut que je creuse encore sa bibliographie !
Écrit par : Le Salon des Lettres | 06/10/2016
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